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De larves, qui coulaient comme un épais liquide Le long de ces vivants haillons.

Tout cela descendait, montait comme une vague Ou s'élançait en pétillant

On eût dit que le corps, enflé d'un souffle vague, Vivait en se multipliant.

Et ce monde rendait une étrange musique, Comme l'eau courante et le vent,

Ou le grain qu'un vanneur d'un mouvement rythmique Agite et tourne dans son van.

Les formes s'effaçaient et n'étaient plus qu'un rêve, Une ébauche lente à venir

Sur la toile oubliée, et que l'artiste achève Seulement par le souvenir.

Derrière les rochers une chienne inquiète Nous regardait d'un oeil fâché,

Epiant le moment de reprendre au squelette Le morceau qu'elle avait lâché.

- Et pourtant vous serez semblable à cette ordure, A cette horrible infection,

Etoile de mes yeux, soleil de ma nature, Vous, mon ange et ma passion!

Oui! telle vous serez, ô la reine des grâces, Apres les derniers sacrements,

Quand vous irez, sous l'herbe et les floraisons grasses, Moisir parmi les ossements.

Alors, ô ma beauté! dites à la vermine Qui vous mangera de baisers,

Que j'ai gardé la forme et l'essence divine De mes amours décomposés!

XXX De profundis clamavi

J'implore ta pitié, Toi, l'unique que j'aime, Du fond du gouffre obscur où mon cœur est tombé.

C'est un univers morne à l'horizon plombé, Où nagent dans la nuit l'horreur et le blasphème;

© "https://athena.unige.ch/" Baudelaire, Les Fleurs du Mal, p. 26 / 106

Un soleil sans chaleur plane au-dessus six mois, Et les six autres mois la nuit couvre la terre; C'est un pays plus nu que la terre polaire

- Ni bêtes, ni ruisseaux, ni verdure, ni bois!

Or il n'est pas d'horreur au monde qui surpasse La froide cruauté de ce soleil de glace Et cette immense nuit semblable au vieux Chaos; Je jalouse le sort des plus vils animaux Qui peuvent se plonger dans un sommeil stupide, Tant l'écheveau du temps lentement se dévide!

XXXI Le Vampire

Toi qui, comme un coup de couteau,

Dans mon cœur plaintif es entrée;

Toi qui, forte comme un troupeau

De démons, vins, folle et parée,

De mon esprit humilié

Faire ton lit et ton domaine;

- Infâme à qui je suis lié

Comme le forçat à la chaîne,

Comme au jeu le joueur têtu,

Comme à la bouteille l'ivrogne,

Comme aux vermines la charogne

- Maudite, maudite sois-tu!

J'ai prié le glaive rapide

De conquérir ma liberté,

Et j'ai dit au poison perfide

De secourir ma lâcheté.

Hélas! le poison et le glaive

M'ont pris en dédain et m'ont dit:

"Tu n'es pas digne qu'on t'enlève A ton esclavage maudit,

Imbécile! - de son empire

Si nos efforts te délivraient,

Tes baisers ressusciteraient

© "https://athena.unige.ch/" Baudelaire, Les Fleurs du Mal, p. 27 / 106

Le cadavre de ton vampire!"

XXXII

Une nuit que j'étais près d'une affreuse Juive, Comme au long d'un cadavre un cadavre étendu, Je me pris à songer près de ce corps vendu A la triste beauté dont mon désir se prive.

Je me représentai sa majesté native, Son regard de vigueur et de grâces armé, Ses cheveux qui lui font un casque parfumé, Et dont le souvenir pour l'amour me ravive.

Are sens