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Apaisant tout, même la faim,

Effaçant tout, même la honte,

Le Poète se dit: "Enfin!

Mon esprit, comme mes vertèbres,

Invoque ardemment le repos;

Le coeur plein de songes funèbres,

Je vais me coucher sur le dos

Et me rouler dans vos rideaux,

O rafraîchissantes ténèbres!"

CXXV Le Rêve d'un Curieux

A Félix Nadar

Connais-tu, comme moi, la douleur savoureuse Et de toi fais-tu dire: "Oh! l'homme singulier!"

- J'allais mourir. C'était dans mon âme amoureuse Désir mêlé d'horreur, un mal particulier; Angoisse et vif espoir, sans humeur factieuse.

Plus allait se vidant le fatal sablier, Plus ma torture était âpre et délicieuse; Tout mon cœur s'arrachait au monde familier.

© "https://athena.unige.ch/" Baudelaire, Les Fleurs du Mal, p. 101 / 106

J'étais comme l'enfant avide du spectacle, Haïssant le rideau comme on hait un obstacle...

Enfin la vérité froide se révéla:

J'étais mort sans surprise, et la terrible aurore M'enveloppait. - Eh quoi! n'est-ce donc que cela?

La toile était levée et j'attendais encore.

CXXVI Le Voyage

A Maxime du Camp

I

Pour l'enfant, amoureux de cartes et d'estampes, L'univers est égal à son vaste appétit.

Ah! que le monde est grand à la clarté des lampes!

Aux yeux du souvenir que le monde est petit!

Un matin nous partons, le cerveau plein de flamme, Le cœur gros de rancune et de désirs amers, Et nous allons, suivant le rythme de la lame, Berçant notre infini sur le fini des mers: Les uns, joyeux de fuir une patrie infâme; D'autres, l'horreur de leurs berceaux, et quelques-uns, Astrologues noyés dans les yeux d'une femme, La Circé tyrannique aux dangereux parfums.

Pour n'être pas changés en bêtes, ils s'enivrent D'espace et de lumière et de cieux embrasés; La glace qui les mord, les soleils qui les cuivrent, Effacent lentement la marque des baisers.

Mais les vrais voyageurs sont ceux-là seuls qui partent Pour partir; cœurs légers, semblables aux ballons, De leur fatalité jamais ils ne s'écartent, Et, sans savoir pourquoi, disent toujours: Allons!

Ceux-là dont les désirs ont la forme des nues, Et qui rêvent, ainsi qu'un conscrit le canon, De vastes voluptés, changeantes, inconnues, Et dont l'esprit humain n'a jamais su le nom!

© "https://athena.unige.ch/" Baudelaire, Les Fleurs du Mal, p. 102 / 106

II

Nous imitons, horreur! la toupie et la boule Dans leur valse et leurs bonds; même dans nos sommeils La Curiosité nous tourmente et nous roule Comme un Ange cruel qui fouette des soleils.

Singulière fortune où le but se déplace, Et, n'étant nulle part, peut être n'importe où!

Où l'Homme, dont jamais l'espérance n'est lasse, Pour trouver le repos court toujours comme un fou!

Notre âme est un trois-mâts cherchant son Icarie; Une voix retentit sur le pont: "Ouvre l'œil!"

Une voix de la hune, ardente et folle, crie:

"Amour... gloire... bonheur!" Enfer! c'est un écueil!

Chaque îlot signalé par l'homme de vigie Est un Eldorado promis par le Destin; L'Imagination qui dresse son orgie

Ne trouve qu'un récif aux clartés du matin.

O le pauvre amoureux des pays chimériques!

Are sens

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