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Même quand elle marche on croirait qu'elle danse, Comme ces longs serpents que les jongleurs sacrés Au bout de leurs bâtons agitent en cadence.

Comme le sable morne et l'azur des déserts, Insensibles tous deux à l'humaine souffrance Comme les longs réseaux de la houle des mers Elle se développe avec indifférence.

Ses yeux polis sont faits de minéraux charmants, Et dans cette nature étrange et symbolique Où l'ange inviolé se mêle au sphinx antique, Où tout n'est qu'or, acier, lumière et diamants, Resplendit à jamais, comme un astre inutile, La froide majesté de la femme stérile.

XXVIII Le Serpent qui danse

Que j'aime voir, chère indolente,

De ton corps si beau,

Comme une étoffe vacillante,

Miroiter la peau!

Sur ta chevelure profonde

Aux âcres parfums,

Mer odorante et vagabonde

Aux flots bleus et bruns,

Comme un navire qui s'éveille

Au vent du matin,

Mon âme rêveuse appareille

Pour un ciel lointain.

Tes yeux, où rien ne se révèle

De doux ni d'amer,

Sont deux bijoux froids où se mêle

L'or avec le fer.

A te voir marcher en cadence,

Belle d'abandon,

On dirait un serpent qui danse

Au bout d'un bâton.

© "https://athena.unige.ch/" Baudelaire, Les Fleurs du Mal, p. 24 / 106

Sous le fardeau de ta paresse Ta tête d'enfant

Se balance avec la mollesse

D'un jeune éléphant,

Et ton corps se penche et s'allonge

Comme un fin vaisseau

Qui roule bord sur bord et plonge

Ses vergues dans l'eau.

Comme un flot grossi par la fonte

Des glaciers grondants,

Quand l'eau de ta bouche remonte

Au bord de tes dents,

Je crois boire un vin de Bohême,

Amer et vainqueur,

Un ciel liquide qui parsème

D'étoiles mon cœur!

XXIX Une Charogne

Rappelez-vous l'objet que nous vîmes, mon âme, Ce beau matin d'été si doux:

Au détour d'un sentier une charogne infâme Sur un lit semé de cailloux,

Les jambes en l'air, comme une femme lubrique, Brûlante et suant les poisons,

Ouvrait d'une façon nonchalante et cynique Son ventre plein d'exhalaisons.

Le soleil rayonnait sur cette pourriture, Comme afin de la cuire à point,

Et de rendre au centuple à la grande Nature Tout ce qu'ensemble elle avait joint; Et le ciel regardait la carcasse superbe Comme une fleur s'épanouir.

La puanteur était si forte, que sur l'herbe Vous crûtes vous évanouir.

Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride, D'où sortaient de noirs bataillons

© "https://athena.unige.ch/" Baudelaire, Les Fleurs du Mal, p. 25 / 106

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