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Chapitre 14 Dame Trude, la sorcière

Il était une fois une petite fille extrêmement têtue et imprudente qui n’écoutait pas ses parents et qui n’obéissait pas quand ils lui avaient dit quelque chose. Pensez-vous que cela pouvait bien tourner ?

Un jour, la fillette dit à ses parents :

– J’ai tellement entendu parler de Dame Trude que je veux une fois aller chez elle : il paraît que c’est fantastique et qu’il y a tant de choses étranges dans sa maison, alors la curiosité me démange.

Les parents le lui défendirent rigoureusement et lui dirent :

– Écoute : Dame Trude est une mauvaise femme qui pratique toutes sortes de choses méchantes et impies ; si tu y vas, tu ne seras plus notre enfant !

La fillette se moqua de la défense de ses parents et alla quand même là-bas. Quand elle arriva chez Dame Trude, la vieille lui demanda :

– Pourquoi es-tu si pâle ?

– Oh ! dit-elle en tremblant de tout son corps, c’est que j’ai eu si peur de ce que j’ai vu.

– Et qu’est-ce que tu as vu ? demanda la vieille.

– J’ai vu sur votre seuil un homme noir, dit la fillette.

– C’était un charbonnier, dit la vieille.

– Après, j’ai vu un homme vert, dit la fillette.

– Un chasseur dans son uniforme, dit la vieille.

– Après, j’ai vu un homme tout rouge de sang.

– C’était un boucher, dit la vieille.

– Ah ! Dame Trude, dans mon épouvante, j’ai regardé par la fenêtre chez vous, mais je ne vous ai pas vue : j’ai vu le Diable en personne avec une tête de feu.

– Oh oh ! dit la vieille, ainsi tu as vu la sorcière dans toute sa splendeur ! Et cela, je l’attendais et je le désirais de toi depuis longtemps : maintenant tu vas me réjouir.

Elle transforma la fillette en une grosse bûche qu’elle jeta au feu, et quand la bûche fut bien prise et en train de flamber, Dame Trude s’assit devant et s’y chauffa délicieusement en disant :

– Oh ! le bon feu, comme il flambe bien clair pour une fois !

Chapitre 15 La Demoiselle de Brakel

Une demoiselle de Brakel alla un jour à la chapelle de Sainte- Anne, au-dessous d’Hunenbourg. Et comme elle désirait beaucoup trouver un mari, se croyant seule dans la chapelle, elle se mit à chanter :

O sainte Anne bénie,

Trouvez-moi un mari !

Vous le connaissez, oui :

Il est blond, il habite

A Suttmer, près d’ici.

Vous le connaissez, oui !

Le sacristain, qui se trouvait derrière l’autel, entendit cette chansonnette et se mit à crier, en se faisant une toute petite voix de tête très pointue :

« Tu l’auras pas ! Tu l’auras pas ! »

La demoiselle eut dans l’idée que c’était le petit Enfant Jésus, tout près d’elle dans les bras de la Sainte Vierge, qui lui avait crié cela, et elle lui rétorqua, furieuse :

« Taratata, petit benêt, tu ferais mieux de boucler ton museau et de laisser parler la mère ! »

Chapitre 16 Les Deux frères

Il y avait une fois deux frères, dont l’un était riche, et l’autre pauvre. Le riche était orfèvre, et il avait un mauvais cœur ; le pauvre gagnait sa misérable vie à nouer des balais ; il était bon et honnête. Il avait deux enfants ; c’étaient deux jumeaux qui se ressemblaient comme deux gouttes d’eau. Ces deux enfants avaient coutume de parcourir en tous sens la maison du riche, où on les nourrissait quelquefois avec les restes. Il arriva que le frère pauvre, allant un jour dans la forêt pour y chercher du bouleau, aperçut un oiseau dont le plumage était entièrement couleur d’or, et si beau qu’il n’en avait jamais vu de pareil. Il ramassa aussitôt une petite pierre, la lança après l’oiseau, et réussit à l’atteindre ; mais il ne tomba de son corps qu’une plume d’or, et l’oiseau disparut en volant. Le pauvre homme prit la plume et la porta à son frère, qui l’examina et dit :

– C’est de l’or pur. Il lui donna en échange beaucoup d’argent.

Le lendemain, le pauvre homme monta au haut d’un bouleau et il allait en couper quelques rameaux, lorsque le même oiseau sortit des feuilles ; le pauvre homme fouilla dans le feuillage, et trouva un nid où il y avait un œuf d’or. Il emporta cet œuf avec lui au logis, et alla le montrer à son frère, qui dit de nouveau :

– C’est de l’or pur, et lui donna une bonne récompense. Puis l’orfèvre ajouta :

– Je voudrais bien avoir cet oiseau.

Le frère pauvre alla une troisième fois dans la forêt, et aperçut de nouveau l’oiseau d’or posé sur la cime de l’arbre ; il prit une pierre et visa si juste qu’il l’abattit du coup ; il le porta à son frère qui lui donna en retour un grands tas d’or. « Maintenant, pensa celui-ci, je pourrai me tirer d’affaire. » Et il revint tout joyeux à la maison. L’orfèvre, qui était habile et rusé, savait bien quel oiseau précieux était tombé entre ses mains. Il appela sa femme, et lui dit :

– Fais moi rôtir cet oiseau d’or, et aie bien soin qu’il n’en sorte pas le plus petit morceau ; je me fais une fête de le manger tout entier.

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