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– plus de frissons, plus de dangers, plus de tremblements de terre. Il me semble presque

que vous ayez envie, pardonnez-moi ma prĂ©somption, ĂŽ hommes supĂ©rieurs –

– envie de la vie la plus inquiĂ©tante et la plus dangereuse, qui m’inspire le plus de crainte Ă  moi, la vie des bĂȘtes sauvages, envie de forĂȘts, de cavernes, de montagnes abruptes et de labyrinthes.

Et ce ne sont pas ceux qui vous conduisent hors du danger qui vous plaisent le plus, ce sont ceux qui vous éconduisent, qui vous éloignent de tous les chemins, les séducteurs.

Mais si de telles envies sont vĂ©ritables en vous, elles me paraissent quand mĂȘme impossibles.

Car la crainte – c’est le sentiment innĂ© et primordial de l’homme ; par la crainte s’explique toute chose, le pĂ©chĂ© originel et la vertu originelle. Ma vertu, elle aussi, est nĂ©e de la crainte, elle s’appelle : science.

Car la crainte des animaux sauvages – c’est cette crainte que l’homme connut le plus longtemps, y compris celle de l’animal que l’homme cache et craint en lui-mĂȘme : –

Zarathoustra l’appelle « la bĂȘte de troupeau intĂ©rieure ».

Cette longue et vieille crainte, enfin affinĂ©e et spiritualisĂ©e, – aujourd’hui il me semble qu’elle s’appelle Science. » –

Ainsi parlait le consciencieux ; mais Zarathoustra, qui rentrait au mĂȘme instant dans sa

caverne et qui avait entendu et deviné la derniÚre partie du discours, jeta une poignée de

roses au consciencieux en riant de ses « vĂ©ritĂ©s ». « Comment ! s’écria-t-il, qu’est-ce que je viens d’entendre ? En vĂ©ritĂ©, il me semble que tu es fou ou bien que je le suis moi-mĂȘme : et je me hĂąte de placer ta « vĂ©ritĂ© » sur la tĂȘte d’un seul coup.

Car la crainte – est notre exception. Le courage cependant, l’esprit d’aventure et la joie de l’incertain, de ce qui n’a pas encore Ă©tĂ© hasardĂ©, – le courage, voilĂ  ce qui me semble toute l’histoire primitive de l’homme.

Il a eu envie de toutes les vertus des bĂȘtes les plus sauvages et les plus courageuses, et il les leur a arrachĂ©es : ce n’est qu’ainsi qu’il est devenu homme.

Ce courage, enfin affinĂ©, enfin spiritualisĂ©, ce courage humain, avec les ailes de l’aigle

et la ruse du serpent : ce courage, me semble-t-il, s’appelle aujourd’hui – »

« Zarathoustra ! » s’écriĂšrent tous ceux qui Ă©taient rĂ©unis, comme d’une seule voix, en parlant d’un grand Ă©clat de rire ; mais quelque chose s’éleva d’eux qui ressemblait Ă  un nuage noir. L’enchanteur, lui aussi, se mit Ă  rire et il dit d’un ton rusĂ© : « Eh bien ! il s’en est allĂ© mon mauvais esprit !

Et ne vous ai-je pas moi-mĂȘme mis en dĂ©fiance contre lui, lorsque je disais qu’il est un

imposteur, un esprit de mensonge et de tromperie ?

Surtout quand il se montre nu. Mais que puis-je faire Ă  ses malices, moi ! Est-ce moi qui l’ai crĂ©Ă© et qui ai crĂ©Ă© le monde ?

Eh bien ! Soyons de nouveau bons et de bonne humeur ! Et quoique Zarathoustra ait le

regard sombre – regardez-le donc ! Il m’en veut – : – avant que la nuit soit venue il apprendra de nouveau à m’aimer et à me louer, il ne peut pas vivre longtemps sans faire de

pareilles folies.

Celui-lĂ  – aime ses ennemis : c’est lui qui connaĂźt le mieux cet art, parmi tous ceux que j’ai rencontrĂ©s. Mais il s’en venge – sur ses amis ! »

Ainsi parlait le vieil enchanteur, et les hommes supĂ©rieurs l’acclamĂšrent : en sorte que

Zarathoustra se mit Ă  circuler dans sa caverne, secouant les mains de ses amis avec

mĂ©chancetĂ© et amour, – comme quelqu’un qui a quelque chose Ă  excuser et Ă  rĂ©parer auprĂšs de chacun. Mais lorsqu’il arriva Ă  la porte de sa caverne, voici, il eut de nouveau

envie du bon air qui rĂ©gnait dehors et de ses animaux, – et il voulut se glisser dehors.

Parmi les filles du désert

1.

« Ne t’en vas pas ! dit alors le voyageur qui s’appelait l’ombre de Zarathoustra, reste auprĂšs de nous, – autrement la vieille et lourde affliction pourrait de nouveau s’emparer de nous.

DĂ©jĂ  le vieil enchanteur nous a prodiguĂ© ce qu’il avait de plus mauvais, et, regarde donc, le vieux pape qui est si pieux a des larmes dans les yeux, et dĂ©jĂ  il s’est de nouveau embarquĂ© sur la mer de la mĂ©lancolie.

Il me semble pourtant que ces rois font bonne figure devant nous ; car, parmi nous tous,

ce sont eux qui ont le mieux appris à faire bonne mine aujourd’hui. S’ils n’avaient pas de

tĂ©moins, je parie que le mauvais jeu recommencerait, chez eux aussi –

– le mauvais jeu des nuages qui passent, de l’humide mĂ©lancolie, du ciel voilĂ©, des vents d’automne qui hurlent : – le mauvais jeu de nos hurlements et de nos cris de dĂ©tresse : reste auprĂšs de nous, ĂŽ Zarathoustra ! Il y a ici beaucoup de misĂšre cachĂ©e qui

voudrait parler, beaucoup de soir, beaucoup de nuages, beaucoup d’air Ă©pais !

Tu nous as nourris de fortes nourritures humaines et de maximes fortifiantes : ne permets pas que, pour le dessert, les esprits de mollesse, les esprits efféminés nous surprennent de nouveau !

Toi seul, tu sais rendre autour de toi l’air fort et pur ! Ai-je jamais trouvĂ© sur la terre un air aussi pur, que chez toi dans ta caverne ?

J’ai pourtant vu bien des pays, mon nez a appris Ă  examiner et Ă  Ă©valuer des airs multiples : mais c’est auprĂšs de toi que mes narines Ă©prouvent leur plus grande joie !

Are sens

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