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Mme Castel> quelques jours avant l'épidémie, s'était rendue dans une ville voisine. Ce n'était même pas un de ces ménages qui offrent au monde l'exemple d'un bonheur exemplaire et le narrateur est en mesure de dire que, selon toute probabilité, ces époux, jusqu'ici,

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n'étaient pas certains d'être satisfaits de leur union. Mais cette séparation brutale et prolongée les avait mis à même de s'assurer qu'ils ne pouvaient vivre éloignés l'un de l'autre, et qu'auprès de cette vérité soudain mise à jour, la peste était peu de chose.

C'était là une exception., Dans la majorité des cas, la séparation, c'était évident, ne devait cesser qu'avec l'épidémie. Et pour nous tous, le sentiment qui faisait notre vie et que, pourtant, nous croyions bien connaître (les Oranais, on l'a déjà dit, ont des passions [85] simples), prenait un visage nouveau. Des maris et des amants qui avaient la plus grande confiance dans leur compagne, se découvraient jaloux. Des hommes qui se croyaient légers en amour retrouvaient une constance.

Des fils, qui avaient vécu près de leur mère en la regardant à peine, mettaient toute leur inquiétude et leur regret dans un pli de son visage qui hantait leur souvenir. Cette séparation brutale, sans bavures, sans avenir prévisible, nous laissait décontenancés, incapables de réagir contre le souvenir de cette présence, encore si proche et déjà si lointaine, qui occupait maintenant nos journées. En fait, nous souffrions deux fois - de notre souffrance d'abord et de celle ensuite que nous imaginions aux absents, fils, épouse ou amante.

En d'autres circonstances, d'ailleurs, nos concitoyens auraient trouvé une issue dans une vie plus extérieure et plus active. Mais, en même temps, la peste les laissait oisifs, réduits à tourner en rond dans leur ville morne et livrés, jour après jour, aux jeux décevants du souvenir. Car dans leurs promenades sans but, ils étaient amenés à passer toujours par les mêmes chemins, et, la plupart du temps, dans une si petite ville, ces chemins étaient précisément ceux qu'à une autre époque, ils avaient parcourus avec l'absent.

Ainsi, la première chose que la peste apporta à nos concitoyens fut l'exil. Et le narrateur est persuadé qu'il peut écrire ici, au nom de tous, ce que lui-même a éprouvé alors, puisqu'il l'a éprouvé en même temps que beaucoup de nos concitoyens. Car c'était bien le sentiment de l'exil que ce creux que nous portions constamment en nous, cette émotion précise, le désir déraisonnable de revenir en arrière ou au contraire de presser la marche du temps, ces flèches brûlantes de la

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mémoire. Si, quelquefois, nous nous laissions aller à l'imagination [86]

et nous plaisions à attendre le coup de sonnette du retour ou un pas familier dans l'escalier, si, à ces moments-là, nous consentions à oublier que les trains étaient immobilisés, si nous nous arrangions alors pour rester chez nous à l'heure où, normalement, un voyageur amené par l'express du soir pouvait être rendu dans notre quartier, bien entendu, ces jeux ne pouvaient durer. Il venait toujours un moment où nous nous apercevions clairement que les trains n'arrivaient pas. Nous savions alors que notre séparation était destinée à durer et que nous deviens essayer de nous arranger avec le temps. Dès lors, nous réintégrions en somme notre condition de prisonniers, nous étions réduits à notre passé, et si même quelques-uns d'entre nous avaient la tentation de vivre dans l'avenir, ils y renonçaient rapidement, autant du moins qu'il leur était possible, en éprouvant les blessures que finalement l'imagination inflige à ceux qui lui font confiance.

En particulier, tous nos concitoyens se privèrent très vite, même en public, de l'habitude qu'ils avaient pu prendre de supputer la durée de leur séparation. Pourquoi ? C'est que lorsque les plus pessimistes l'avaient fixée par exemple à six mois, lorsqu'ils avaient épuisé d'avance toute l'amertume de ces mois à venir, hissé à grand'peine leur courage au niveau de cette épreuve, tendu leurs dernières forces pour demeurer sans faiblir à la hauteur de cette souffrance étirée sur une si longue suite de jours, alors, parfois, un ami de rencontre, un avis donné par un journal, un soupçon fugitif ou une brusque clairvoyance, leur donnait l'idée qu'après tout, il n'y avait pas de raison pour que la maladie ne durât pas plus de six mois, et peut-être un an, ou plus encore.

À ce moment, l'effondrement de leur courage, de [87] leur volonté et de leur patience était si brusque qu'il leur semblait qu'ils ne pourraient plus jamais remonter de ce trou. Ils s'astreignaient par conséquent à ne penser jamais au terme de leur délivrance, à ne plus se tourner vers l'avenir et à toujours garder, pour ainsi dire, les yeux baissés. Mais, naturellement, cette prudence, cette façon de ruser avec la douleur, de fermer leur garde pour refuser le combat étaient

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mal récompensées. En même temps qu'ils évitaient cet effondrement dont ils ne voulaient à aucun prix, ils se privaient en effet de ces moments, en somme assez fréquents, où ils pouvaient oublier la peste dans les images de leur réunion à venir. Et par là, échoués à mi-distance de ces abîmes et de ces sommets, ils flottaient plutôt qu'ils ne vivaient, abandonnés à des jours sans direction et à des souvenirs stériles, ombres errantes qui n'auraient pu prendre force qu'en ac-ceptant de s'enraciner dans la terre de leur douleur.

Ils éprouvaient ainsi la souffrance profonde de tous les prisonniers et de tous les exilés, qui est de vivre avec une mémoire qui ne sert à rien. Ce passé même auquel ils réfléchissaient sans cesse n'avait que le goût du regret. Ils auraient voulu, en effet, pouvoir lui ajouter tout ce qu'ils déploraient de n'avoir pas fait quand ils pouvaient encore le faire avec celui ou celle qu'ils attendaient - de même qu'à toutes les circonstances, même relativement heureuses, de leur vie de prisonniers, ils mêlaient l'absent, et ce qu'ils étaient alors ne pouvait les satisfai-re. Impatients de leur présent, ennemis de leur passé et privés d'avenir, nous ressemblions bien ainsi à ceux que la justice ou la haine humaines font vivre derrière des barreaux. Pour finir, le seul moyen d'échapper à ces vacances insupportables était de faire marcher à nouveau les trains par l'imagination et de remplir les [88] heures avec les carillons répétés d'une sonnette pourtant obstinément silencieuse.

Mais si c'était l'exil, dans la majorité des cas c'était l'exil chez soi. Et quoique le narrateur n'ait connu que l'exil de tout le monde, il ne doit pas oublier ceux, comme le journaliste Rambert ou d'autres, pour qui, au contraire, les peines de la séparation s'amplifièrent du fait que, voyageurs surpris par la peste et retenus dans la ville, ils se trouvaient éloignés à la fois de l'être qu'ils ne pouvaient rejoindre et du pays qui était le leur. Dans l'exil général, ils étaient les plus exilés, car si le temps suscitait chez eux, comme chez tous, l'angoisse qui lui est propre, ils étaient attachés aussi à l'espace et se heurtaient sans cesse aux murs qui séparaient leur refuge empesté de leur patrie perdue. C'était eux sans doute qu'on voyait errer à toute heure du jour dans la ville poussiéreuse, appelant en silence des soirs qu'ils étaient

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seuls à connaître, et les matins de leur pays. Ils nourrissaient alors leur mal de signes impondérables et de messages déconcertants comme un vol d'hirondelles, une rosée de couchant, ou ces rayons bizarres que le soleil abandonne parfois dans les rues désertes. Ce monde extérieur qui peut toujours sauver de tout, ils fermaient les yeux sur lui, entêtés qu'ils étaient à caresser leurs chimères trop réelles et à poursuivre de toutes leurs forces les images d'une terre où une certaine lumière, deux ou trois collines, l'arbre favori et des visages de femmes composaient un climat pour eux irremplaçable.

Pour parler enfin plus expressément des amants, qui sont les plus intéressants et dont le narrateur est peut-être mieux placé pour parler, ils se trouvaient tourmentés encore par d'autres angoisses au nombre desquelles il faut signaler le remords. Cette situation, [89] en effet, leur permettait de considérer leur sentiment avec une sorte de fiévreuse objectivité. Et il était rare que, dans ces occasions, leurs propres défaillances ne leur apparussent pas clairement. Ils en trouvaient la première occasion dans la difficulté qu'ils avaient à imaginer précisément les faits et gestes de l'absent. Ils déploraient alors l'ignorance où ils étaient de son emploi du temps ; ils s'accusaient de la légèreté avec laquelle ils avaient négligé de s'en informer et feint de croire que, pour un être qui aime, l'emploi du temps de l'aimé n'est pas la source de toutes les joies. Il leur était facile, à partir de ce moment, de remonter dans leur amour et d'en examiner les imperfec-tions. En temps ordinaire, nous savions tous, consciemment ou non, qu'il n'est pas d'amour qui ne puisse se surpasser, et nous acceptions pourtant, avec plus ou moins de tranquillité, que le nôtre demeurât médiocre. Mais le souvenir est plus exigeant. Et, de façon très conséquente, ce malheur qui nous venait de l'extérieur et qui frappait toute une ville, ne nous apportait pas seulement une souffrance injuste dont nous aurions pu nous indigner. Il nous provoquait aussi à nous faire souffrir nous-mêmes et nous faisait ainsi consentir à la douleur. C'était là une des façons qu'avait la maladie de détourner l'attention et de brouiller les cartes.

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Ainsi, chacun dut accepter de vivre au jour le jour, et seul en face du ciel. Cet abandon général qui pouvait à la longue tremper les caractères commençait pourtant par les rendre futiles. Pour certains de nos concitoyens, par exemple, ils étaient alors soumis à un autre esclavage qui les mettait au service du soleil et de la pluie. Il semblait, à les voir, qu'ils recevaient pour la première fois, et directement, l'impression du temps qu'il faisait. Ils avaient la mine réjouie sur la simple visite d'une

[90] lumière dorée, tandis que les jours de pluie mettaient un voile épais sur leurs visages et leurs pensées. Ils échappaient, quelques semaines plus tôt, à cette faiblesse et à cet asservissement déraisonnable parce qu'ils n'étaient pas seuls en face du monde et que, dans une certaine mesure, l'être qui vivait avec eux se plaçait devant leur univers. À partir de cet instant, au contraire, ils furent apparemment livrés aux caprices du ciel. c'est-à-dire qu'ils souffrirent et espérèrent sans raison,

Dans ces extrémités de la solitude, enfin, personne ne pouvait espérer l'aide du voisin et chacun restait seul avec sa préoccupation. Si l'un d'entre nous, par hasard, essayait de se confier ou de dire quelque chose de son sentiment, la réponse qu'il recevait, quelle qu'elle fût, le blessait la plupart du temps. Il s'apercevait alors que son interlocuteur et lui ne parlaient pas de la même chose. Lui, en effet, s'exprimait du fond de longues journées de rumination et de souffrances et l'image qu'il voulait communiquer avait cuit longtemps au feu de l'attente et de la passion. L'autre, au contraire, imaginait une émotion conventionnelle, la douleur qu'on vend sur les marchés, une mélancolie de série. Bienveillante ou hostile, la réponse tombait toujours à faux, il fallait y renoncer. Ou du moins, pour ceux à qui le silence était insupportable, et puisque les autres ne pouvaient trouver le vrai langage du cœur, ils se résignaient à adopter la langue des marchés et à parler, eux aussi, sur le mode conventionnel, celui de la simple relation et du fait divers, de la chronique quotidienne en quelque sorte. Là encore, les douleurs les plus vraies prirent l'habitude de se traduire dans les formules banales de la conversation. C'est à ce prix seulement que les

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prisonniers de la peste pouvaient obtenir la compassion de leur concierge ou l'intérêt de leurs auditeurs.

[91] Cependant, et c'est le plus important, si douloureuses que fussent ces angoisses, si lourd à porter que fût ce cœur pourtant vide, on peut bien dire que ces exilés, dans la première période de la peste, furent des privilégiés. Au moment même, en effet, où la population commençait à s'affoler, leur pensée était tout entière tournée vers l'être qu'ils attendaient. Dans la détresse générale, l'égoïsme de l'amour les préservait, et, s'ils pensaient à la peste, ce n'était jamais que dans la mesure où elle donnait à leur séparation des risques d'être éternelle. Ils apportaient ainsi au cœur même de l'épidémie une distraction salutaire qu'on était tenté de prendre pour du sang-froid.

Leur désespoir les sauvait de la panique, leur malheur avait du bon. Par exemple, s'il arrivait que l'un d'eux fût emporté par la maladie, c'était presque toujours sans qu'il eût le temps d'y prendre garde. Tiré de cette longue conversation intérieure qu'il soutenait avec une ombre, il était alors jeté sans transition au plus épais silence de la terre. Il n'avait eu le temps de rien.

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[92] Pendant que nos concitoyens essayaient de s'arranger avec ce soudain exil, la peste mettait des gardes aux portes et détournait les navires qui faisaient route vers Oran. Depuis la fermeture, pas un véhicule n'était entré dans la ville. À partir de ce jour-là, on eut l'impression que les automobiles se mettaient à tourner en rond. Le port présentait aussi un aspect singulier, pour ceux qui le regardaient du haut des boulevards. L'animation habituelle qui en faisait l'un des premiers ports de la côte s'était brusquement éteinte. Quelques navires maintenus en quarantaine s'y voyaient encore. Mais, sur les quais, de grandes grues désarmées, les wagonnets renversés sur le flanc, des piles solitaires de fûts ou de sacs, témoignaient que le commerce, lui aussi, était mort de la peste.

Malgré ces spectacles inaccoutumés, nos concitoyens avaient apparemment du mal à comprendre ce qui leur arrivait. Il y avait les sentiments communs comme la séparation ou la peur, mais on continuait aussi de mettre au premier plan les préoccupations personnelles. Personne n'avait encore accepté réellement la maladie. La plupart étaient surtout sensibles à ce qui dérangeait leurs habitudes ou atteignait leurs intérêts. Ils en étaient [93] agacés ou irrités et ce ne sont pas là des sentiments qu'on puisse opposer à la peste. Leur première réaction, par exemple, fut d'incriminer l'administration. La réponse du préfet en présence des critiques dont la presse se faisait l'écho (« Ne pourrait-on envisager un assouplissement des mesures envisagées ? ») fut assez imprévue. Jusqu'ici, ni les journaux ni l'agence Ransdoc n'avaient reçu communication officielle des statistiques de la maladie. Le préfet

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les communiqua, jour après jour, à l'agence, en la priant d'en faire une annonce hebdomadaire.

Là encore, cependant, la réaction du public ne fut pas immédiate.

En effet, l'annonce que la troisième semaine de peste avait compté trois cent deux morts ne parlait pas à l'imagination. D'une part, tous peut-être n'étaient pas morts de la peste. Et, d'autre part, personne en ville ne savait combien, en temps ordinaire, il mourait de gens par semaine. La ville avait deux cent mille habitants. On ignorait si cette proportion de décès était normale. C'est même le genre de précisions dont on ne se préoccupe jamais, malgré l'intérêt évident qu'elles présentent. Le public manquait, en quelque sorte, de points de comparaison. Ce n'est qu'à la longue, en constatant l'augmentation des décès, que l'opinion prit conscience de la vérité. La cinquième semaine donna en effet trois cent vingt et un morts et la sixième, trois cent quarante-cinq. Les augmentations, du moins, étaient éloquentes. Mais elles n'étaient pas assez fortes pour que nos concitoyens ne gardassent, au milieu de leur inquiétude, l'impression qu'il s'agissait d'un accident sans doute fâcheux, mais après tout temporaire.

Ils continuaient ainsi de circuler dans les rues et de s'attabler à la terrasse des cafés. Dans l'ensemble, ils [94] n'étaient pas lâches, échangeaient plus de plaisanteries que de lamentations et faisaient mine d'accepter avec bonne humeur des inconvénients évidemment passagers. Les apparences étaient sauvées. Vers la fin du mois cependant, et à peu près pendant la semaine de prières dont il sera question plus loin, des transformations plus graves modifièrent l'aspect de notre ville. Tout d'abord, le préfet prit des mesures concernant la circulation des véhicules et le ravitaillement. Le ravitaillement fut limité et l'essence rationnée. On prescrivit même des économies d'électricité.

Seuls, les produits indispensables parvinrent par la route et par l'air, à Oran. C'est ainsi qu'on vit la circulation diminuer progressivement jusqu'à devenir à peu près nulle, des magasins de luxe fermer du jour au lendemain, d'autres garnir leurs vitrines de pancartes négatives, pendant que des files d'acheteurs stationnaient devant leurs portes.

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Oran prit ainsi un aspect singulier. Le nombre des piétons devint plus considérable et même, aux heures creuses, beaucoup de gens réduits à l'inaction par la fermeture des magasins ou de certains bureaux emplissaient les rues et les cafés. Pour le moment, ils n'étaient pas encore en chômage, mais en congé. Oran donnait alors, vers trois heures de l'après-midi par exemple, et sous un beau ciel, l'impression trompeuse d'une cité en fête dont on eût arrêté la circulation et fermé les magasins pour permettre le déroulement d'une manifestation publique, et dont les habitants eussent envahi les rues pour participer aux réjouissances.

Naturellement, les cinémas profitaient de ce congé général et faisaient de grosses affaires. Mais les circuits que les films accomplissaient dans le département étaient interrompus. Au bout de deux semaines, les établissements furent obligés d'échanger leurs program-mes [95] et, après quelque temps, les cinémas finirent par projeter toujours le même film. Leurs recettes cependant ne diminuaient pas.

Les cafés enfin, grâce aux stocks considérables accumulés dans une ville où le commerce des vins et des alcools tient la première place, purent également alimenter leurs clients. À vrai dire, on buvait beaucoup. Un café ayant affiché que « le vin probe tue le microbe », l'idée déjà naturelle au public que l'alcool préservait des maladies infectieu-ses se fortifia dans l'opinion. Toutes les nuits, vers deux heures, un nombre assez considérable d'ivrognes expulsés des cafés emplissaient les rues et s'y répandaient en propos optimistes.

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