« – Cela ne fait rien, madame. J’en ai séparé déjà de très laids. Mais je demanderai à madame si elle s’est informée du parfum.
« – Oui, ma bonne Rose, la verveine.
« – Tant mieux, madame, j’aime beaucoup cette odeur-là ! Madame peut-elle me dire aussi si la maîtresse de monsieur porte du linge de soie ?
«
–
Non, mon enfant
: de la batiste avec
dentelles.
« – Oh ! alors, c’est une personne comme il faut. Le linge de soie commence à devenir commun.
« – C’est très vrai, ce que vous dites là !
« – Eh bien, madame, je vais prendre mon service.
«
Elle prit son service, en effet,
immédiatement, comme si elle n’eût fait que cela toute sa vie.
« Une heure plus tard mon mari rentrait. Rose ne leva même pas les yeux sur lui, mais il leva les 93
yeux sur elle, lui. Elle sentait déjà la verveine à plein nez. Au bout de cinq minutes elle sortit.
« Il me demanda aussitôt :
« – Qu’est-ce que c’est que cette fille-là ?
« – Mais... ma nouvelle femme de chambre.
« – Où l’avez-vous trouvée ?
« – C’est la baronne de Grangerie qui me l’a donnée, avec les meilleurs renseignements.
« – Ah ! elle est assez jolie !
« – Vous trouvez ?
« – Mais oui... pour une femme de chambre.
« J’étais ravie. Je sentais qu’il mordait déjà.
« Le soir même, Rose me disait : « Je puis maintenant promettre à madame que ça ne durera pas plus de quinze jours. Monsieur est très facile !
« – Ah ! vous avez déjà essayé ?
« – Non, madame ; mais ça se voit au premier coup d’œil. Il a déjà envie de m’embrasser en passant à côté de moi.
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« – Il ne vous a rien dit ?
« – Non, madame ; il m’a seulement demandé mon nom... pour entendre le son de ma voix.
« – Très bien, ma bonne Rose. Allez le plus vite que vous pourrez.
«
–
Que madame ne craigne rien. Je ne
résisterai que le temps nécessaire pour ne pas me déprécier.
« Au bout de huit jours, mon mari ne sortait presque plus. Je le voyais rôder tout l’après-midi dans la maison ; et ce qu’il y avait de plus significatif dans son affaire, c’est qu’il ne m’empêchait plus de sortir. Et moi j’étais dehors toute la journée... pour... pour le laisser libre.
«
Le neuvième jour, comme Rose me
déshabillait, elle me dit d’un air timide :