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La fil ette qui avait ému l’Amérique était-el e née de l’imagination du cerveau malade d’un écrivain en panne d’inspiration ? Comment un tel détail avait-il pu être négligé aussi grossièrement ? L’information du Concord Herald, reprise par tous les médias, était en train de semer le doute sur la vérité à propos de l’Affaire Harry Quebert.

Le matin du vendredi 23 octobre, je pris un vol pour Concord, où j’arrivai en début d’après-midi. Je louai une voiture à l’aéroport et me rendis directement au quartier général de la police d’État, où m’attendait Gahalowood. Il me fit le point sur ce qu’il avait pu apprendre à propos du passé de la famille Kellergan en Alabama.

- David et Louisa Kel ergan se marient en 1955, m’expliqua-t-il. Il est déjà le pasteur d’une paroisse florissante, et sa femme aide à la développer davantage. Nola naît en 1960. Rien à signaler durant les années qui suivent. Mais une nuit de printemps de l’année 1969, un incendie ravage la maison. La fillette est sauvée des flammes in extremis, mais la mère meurt. Quelques semaines plus tard, le révérend quitte Jackson.

- Quelques semaines ? m’étonnai-je.

- Oui. Et ils vont à Aurora.

- Mais alors pourquoi Harry m’a-t-il dit que Nola était battue par sa mère ?

- Il faut croire que c’était son père.

- Non, non ! m’écriai-je. Harry m’a parlé de la mère ! C’était la mère ! J’ai même les enregistrements !

- Alors écoutons-les, ces enregistrements, suggéra Gahalowood.

J’avais emporté avec moi mes minidisques. Je les étalai sur le bureau de Gahalowood et m’efforçai de me repérer parmi les étiquettes des pochettes. J’avais

effectué un classement assez précis, par personne et par date, mais je ne parvins pourtant pas à mettre la main sur l’enregistrement en question. C’est alors qu’en vidant intégralement mon sac, je retrouvai un dernier disque, sans date, qui m’avait échappé.

Je l’introduisis aussitôt dans le lecteur.

- C’est étrange, dis-je. Pourquoi n’ai-je pas daté ce disque ?

J’enclenchai la machine. J’entendis ma voix qui annonçait que nous étions le mardi 1er juil et 2008. J’enregistrais Harry dans la salle de visite de la prison.

- Est-ce la raison pour laquelle vous avez voulu partir ? Ce départ que vous aviez prévu ensemble, le soir du 30 août, pourquoi ?

- Ça, Marcus, c’était à cause d’une terrible histoire. Vous enregistrez, là ?

- Oui.

- Je vais vous raconter un épisode très grave. Pour que vous compreniez. Mais je ne veux pas que cela s’ébruite.

- Comptez sur moi.

- Vous savez, pendant notre semaine à Martha’s Vineyard, en fait de prétendre être avec une amie, elle avait tout simplement fugué. Elle était partie sans rien dire à personne. Lorsque je l’ai revue, le lendemain de notre retour, el e avait une mine affreusement triste. Elle m’a dit que sa mère l’avait battue. Elle avait le corps marqué.

Elle pleurait. Ce jour-là elle m’a dit que sa mère la punissait pour un rien. Qu’elle la frappait, à coups de règle en fer, et qu’el e lui faisait aussi cette saloperie qu’ils font à Guantânamo, les simulations de noyade : elle remplissait une bassine d’eau, elle prenait sa fille par les cheveux, et el e lui plongeait la tête dans l’eau. Elle disait que c’était pour la délivrer.

- La délivrer ?

- La délivrer du mal. Une espèce de baptême, j’imagine. Jésus dans le Jourdain ou quelque chose comme ça. Au début, je ne pouvais pas y croire, mais les preuves étaient là. Je lui ai alors demandé : « Mais qui te fait ça ? Maman. Et pourquoi ton père ne réagit pas ? Papa s’enferme dans le garage et il écoute de la musique, très fort. Il fait ça quand Maman me punit. Il ne veut pas entendre. » Nola n’en pouvait plus, Marcus. Elle n’en pouvait plus. J’ai voulu régler cette histoire, al er voir les Kellergan. Il fallait que cela cesse. Mais Nola m’a supplié de ne rien faire, elle m’a dit qu’el e aurait des ennuis terribles, que ses parents l’éloigneraient certainement de la ville, et que nous ne nous verrions jamais plus. Néanmoins cette situation ne pouvait plus durer.

Alors vers la fin août, autour du 20, nous avons décidé qu’il fal ait partir. Vite. Et en secret, bien sûr. Et nous avons fixé le départ au 30 août. Nous voulions rouler jusqu’au Canada, passer la frontière du Vermont. Aller en Colombie-Britannique peut-être, nous installer dans une cabane en bois. La belle vie au bord d’un lac. Personne n’aurait jamais rien su.

- Alors voilà pourquoi vous aviez prévu de vous enfuir tous les deux ?

- Oui.

- Mais pourquoi ne voulez-vous pas que je parle de cela ?

- Ça, ce n’est que le début de l’histoire, Marcus. Car j’ai fait ensuite une découverte terrible à propos de la mère de Nola…

(Bruit de sonnerie). La voix d’un gardien annonce la fin de la visite.

- Nous reprendrons cette conversation la prochaine fois, Marcus. En attendant, surtout, gardez ça pour vous.

- Et qu’avait-il découvert à propos de la mère de Nola ? demanda Gahalowood, impatient.

- Je ne me rappelle pas de la suite, répondis-je, troublé, en fouillant parmi les autres disques.

Soudain, je m’arrêtai, blême et je m’écriai :

- C’est pas vrai !

- Quoi, l’écrivain ?

- C’était le dernier enregistrement de Harry ! Voilà pourquoi il n’y a pas de date sur le disque ! Je l’avais complètement oublié. Nous n’avons jamais fini cette conversation ! Car après ça, il y a eu les révélations sur Pratt, puis Harry ne voulait plus que j’enregistre et j’ai continué mes interviews en prenant des notes sur un calepin.

Ensuite il y eut la fuite des feuillets et Harry s’est fâché contre moi. Comment ai-je pu être un imbécile à ce point ?

- Il faut impérativement parler à Harry, déclara Gahalowood en attrapant son manteau. Nous devons savoir ce qu’il avait découvert sur Louisa Kellergan.

Et nous partîmes pour le Sea Side Motel.

À notre grande surprise, ce ne fut pas Harry mais une grande blonde qui ouvrit la porte de la chambre 8. Nous allâmes trouver le réceptionniste, qui nous expliqua tout simplement :

Are sens