- Nola a tué sa mère, David. Vous rendez-vous compte de la gravité de la situation ?
David Kellergan tremblait. Il pleurait, sa tête tournait, les idées se bousculaient dans sa tête. Il eut besoin de vomir. Jeremy Lewis lui tendit une corbeil e à papier pour qu’il puisse se soulager.
- Ne dites rien à la police, Jeremy, je vous en supplie !
- Mais c’est très grave, David !
- Ne dites rien ! Au nom du Ciel, ne dites rien. Si la police le savait, Nola finirait dans une maison de correction, ou Dieu sait où. Elle n’a que neuf ans…
- Alors il faut la soigner, dit Lewis. Nola est habité par le Malin, il faut la guérir.
- Non, Jeremy ! Pas ça !
- Il faut l’exorciser, David. C’est la seule solution pour la délivrer du Mal.
- Je l’ai exorcisée, nous expliqua le pasteur Lewis. Pendant plusieurs jours, nous avons essayé de faire sortir le démon de son corps.
- Qu’est-ce que c’est que ce délire ? murmurai-je.
- Enfin ! s’éleva Lewis, pourquoi êtes-vous à ce point sceptique ? Nola n’était pas Nola : le Diable avait pris possession de son corps !
- Que lui avez-vous fait ? tonna Gahalowood.
- En principe des prières suffisent, sergent !
- Laissez-moi deviner : là, ça n’a pas suffi !
- Le Diable était fort ! Alors nous lui avons plongé la tête dans un baquet d’eau bénite, pour en venir à bout.
- Les simulations de noyade, dis-je.
- Mais ça non plus, ça n’a pas suffi. Alors, pour terrasser le Démon et lui faire abandonner le corps de Nola, nous l’avons frappé.
- Vous avez battu la petite ? explosa Gahalowood.
- Non, pas la petite : le Malin !
- Vous êtes fou, Lewis !
- Nous devions la délivrer ! Et nous pensions que nous y étions parvenus. Mais Nola s’est mise à avoir des sortes de crises. Elle et son père sont restés chez nous quelque temps et la petite est devenue incontrôlable. Elle s’est mise à voir sa mère.
- Vous voulez dire que Nola avait des hallucinations ? demanda Gahalowood.
- Pire : elle a commencé à développer une espèce de dédoublement de personnalité. Il lui arrivait de devenir sa propre mère, et elle se punissait pour ce qu’elle avait fait. Un jour, je l’ai trouvée en train de hurler dans la salle de bains. Elle avait rempli la baignoire et se tenait d’une main fermement par les cheveux et se forçait à plonger la tête dans l’eau glacée. Ça ne pouvait plus continuer ainsi. Alors David a décidé de s’enfuir loin. Très loin. Il a dit qu’il devait quitter Jackson, quitter l’Alabama, que l’éloignement et le temps aideraient certainement Nola à aller mieux. À ce moment, j’avais entendu dire que la paroisse d’Aurora se cherchait un nouveau pasteur, et il n’a pas hésité une seconde. C’est ainsi qu’il est parti se terrer à l’autre bout du pays, dans le New Hampshire.
3. Election Day
“Votre vie sera ponctuée de grands événements. Mentionnez-les dans vos livres, Marcus. Car s’ils devaient s’avérer très mauvais, ils auront au moins le mérite de consigner quelques pages d’Histoire.”
Extrait de l’édition du Concord Herald du 5 novembre 2008
BARACK OBAMA ÉLU 44e PRÉSIDENT DES ÉTATS-UNIS
Le candidat démocrate Barack Obama remporte l’élection présidentielle face au républicain McCain et devient le 44e Président des États-Unis. Le New Hampshire, qui avait donné la victoire à George W Bush en 2004, est revenu dans le camp démocrate
[…]
5 novembre 2008
Au lendemain de l’élection, New York était en liesse. Dans les rues, les gens avaient célébré la victoire démocrate jusque tard dans la nuit, comme pour chasser les démons du dernier double mandat. Pour ma part, je n’avais participé à la ferveur populaire qu’à travers le poste de télévision de mon bureau, dans lequel j’étais enfermé depuis trois jours.
Ce matin-là, Denise arriva à huit heures au bureau avec un pull Obama, une tasse Obama, un badge Obama et un paquet d’autocol ants Obama. « Oh, vous êtes déjà là, Marcus, me dit-elle en passant la porte d’entrée et en voyant que tout était al umé. Vous étiez dehors hier soir ? Quelle victoire ! Je vous ai apporté des autocollants pour votre voiture. » Tout en parlant, elle déposa ses affaires sur sa table, al uma la machine à café et débrancha le répondeur, puis el e pénétra dans mon bureau. En voyant l’état de la pièce, elle ouvrit de grands yeux et s’écria :
- Marcus, au nom du Ciel, que s’est-il passé ici ?
J’étais assis sur mon fauteuil et je contemplais l’un des murs que j’avais passé une partie de la nuit à détapisser avec mes notes et les schémas de l’enquête. Je m’étais repassé en boucle les enregistrements de Harry, de Nancy Hattaway, de Robert Quinn.
- Il y a quelque chose dans cette affaire que je ne comprends pas, dis-je. C’est en train de me rendre fou.
- Vous avez passé la nuit ici ?
- Oui.
- Oh, Marcus, et moi qui pensais que vous étiez dehors, à vous amuser un peu.
Ça fait si longtemps que vous ne vous êtes pas amusé. C’est votre roman qui vous tracasse ?
- C’est ce que j’ai découvert la semaine dernière qui me tracasse.