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que le doute soit un pĂ©chĂ©. Je sais trop bien Ă  quoi ils croient eux-mĂȘmes le plus.

Ce n’est vraiment pas Ă  des arriĂšre-mondes et aux gouttes du sang rĂ©dempteur : mais eux aussi croient davantage au corps et c’est leur propre corps qu’ils considĂšrent comme

la chose en soi.

Mais le corps est pour eux une chose maladive : et volontiers ils sortiraient de leur peau.

C’est pourquoi ils Ă©coutent les prĂ©dicateurs de la mort et ils prĂȘchent eux-mĂȘmes les arriĂšre-mondes.

Écoutez plutĂŽt, mes frĂšres, la voix du corps guĂ©ri : c’est une voix plus loyale et plus pure.

Le corps sain parle avec plus de loyauté et plus de pureté, le corps complet, carré de la

tĂȘte Ă  la base : il parle du sens de la terre. –

Ainsi parlait Zarathoustra.

Des contempteurs du corps

C’est aux contempteurs du corps que je veux dire leur fait. Ils ne doivent pas changer de

mĂ©thode d’enseignement, mais seulement dire adieu Ă  leur propre corps – et ainsi devenir

muets.

« Je suis corps et Ăąme » – ainsi parle l’enfant. Et pourquoi ne parlerait-on pas comme

les enfants ?

Mais celui qui est Ă©veillĂ© et conscient dit : Je suis corps tout entier et rien autre chose ; l’ñme n’est qu’un mot pour une parcelle du corps.

Le corps est un grand systÚme de raison, une multiplicité avec un seul sens, une guerre

et une paix, un troupeau et un berger.

Instrument de ton corps, telle est aussi ta petite raison que tu appelles esprit, mon frĂšre, petit instrument et petit jouet de ta grande raison.

Tu dis « moi » et tu es fier de ce mot. Mais ce qui est plus grand, c’est – ce Ă  quoi tu ne veux pas croire – ton corps et son grand systĂšme de raison : il ne dit pas moi, mais il est moi.

Ce que les sens Ă©prouvent, ce que reconnaĂźt l’esprit, n’a jamais de fin en soi. Mais les

sens et l’esprit voudraient te convaincre qu’ils sont la fin de toute chose : tellement ils sont vains.

Les sens et l’esprit ne sont qu’instruments et jouets : derriĂšre eux se trouve encore le soi. Le soi, lui aussi, cherche avec les yeux des sens et il Ă©coute avec les oreilles de l’esprit.

Toujours le soi écoute et cherche : il compare, soumet, conquiert et détruit. Il rÚgne, et domine aussi le moi.

DerriĂšre tes sentiments et tes pensĂ©es, mon frĂšre, se tient un maĂźtre plus puisant, un sage inconnu – il s’appelle soi. Il habite ton corps, il est ton corps.

Il y a plus de raison dans ton corps que dans ta meilleure sagesse. Et qui donc sait pourquoi ton corps a précisément besoin de ta meilleure sagesse ?

Ton soi rit de ton moi et de ses cabrioles. « Que me sont ces bonds et ces vols de la pensée ? dit-il. Un détour vers mon but. Je suis la lisiÚre du moi et le souffleur de ses idées. »

Le soi dit au moi : « Éprouve des douleurs ! » Et le moi souffre et rĂ©flĂ©chit Ă  ne plus souffrir – et c’est Ă  cette fin qu’il doit penser.

Le soi dit au moi : « Éprouve des joies ! » Alors le moi se rĂ©jouit et songe Ă  se rĂ©jouir souvent encore – et c’est Ă  cette fin qu’il doit penser.

Je veux dire un mot aux contempteurs du corps. Qu’ils mĂ©prisent, c’est ce qui fait leur

estime. Qu’est-ce qui crĂ©a l’estime et le mĂ©pris et la valeur et la volontĂ© ?

Le soi crĂ©ateur crĂ©a, pour lui-mĂȘme, l’estime et le mĂ©pris, la joie et la peine. Le corps

crĂ©ateur crĂ©a pour lui-mĂȘme l’esprit comme une main de sa volontĂ©.

MĂȘme dans votre folie et dans votre mĂ©pris, vous servez votre soi, vous autres contempteurs du corps. Je vous le dis : votre soi lui-mĂȘme veut mourir et se dĂ©tourner de

la vie.

Il n’est plus capable de faire ce qu’il prĂ©fĂ©rerait : – crĂ©er au-dessus de lui-mĂȘme. VoilĂ 

son désir préféré, voilà toute son ardeur.

Mais il est trop tard pour cela : – ainsi votre soi veut disparaütre, î contempteurs du corps.

Votre soi veut disparaĂźtre, c’est pourquoi vous ĂȘtes devenus contempteurs du corps ! Car vous ne pouvez plus crĂ©er au-dessus de vous.

C’est pourquoi vous en voulez à la vie et à la terre. Une envie inconsciente est dans le

regard louche de votre mépris.

Je ne marche pas sur votre chemin, contempteurs du corps ! Vous n’ĂȘtes point pour moi

des ponts vers le Surhomme ! –

Ainsi parlait Zarathoustra.

Des joies et des passions

Mon frùre, quand tu as une vertu, et quand elle est ta vertu, tu ne l’as en commun avec personne.

Il est vrai que tu voudrais l’appeler par son nom et la caresser ; tu voudrais la prendre

par l’oreille et te divertir avec elle.

Et voici ! Maintenant elle aura en commun avec le peuple le nom que tu lui donnes, tu

es devenu peuple et troupeau avec la vertu !

Are sens