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Et qu'elle aurait longtemps, pour la cacher au monde, Dans un caveau mise au secret.

Pauvre ange, elle chantait, votre note criarde:

"Que rien ici-bas n'est certain, Et que toujours, avec quelque soin qu'il se farde, Se trahit l'égoïsme humain;

Que c'est un dur métier que d'être belle femme, Et que c'est le travail banal

De la danseuse folle et froide qui se pâme Dans son sourire machinal;

Que bâtir sur les cœurs est une chose sotte; Que tout craque, amour et beauté,

Jusqu'à ce que l'Oubli les jette dans sa hotte Pour les rendre à l'Eternité!"

J'ai souvent évoqué cette lune enchantée, Ce silence et cette langueur,

Et cette confidence horrible chuchotée Au confessionnal du coeur.

XLVI L'Aube spirituelle

Quand chez les débauchés l'aube blanche et vermeille Entre en société de l'Idéal rongeur, Par l'opération d'un mystère vengeur Dans la brute assoupie un ange se réveille.

Des Cieux Spirituels l'inaccessible azur, Pour l'homme terrassé qui rêve encore et souffre, S'ouvre et s'enfonce avec l'attirance du gouffre.

Ainsi, chère Déesse, Etre lucide et pur, Sur les débris fumeux des stupides orgies Ton souvenir plus clair, plus rose, plus charmant, A mes yeux agrandis voltige incessamment.

Le soleil a noirci la flamme des bougies;

© "https://athena.unige.ch/" Baudelaire, Les Fleurs du Mal, p. 37 / 106

Ainsi, toujours vainqueur, ton fantôme est pareil, Ame resplendissante, à l'immortel soleil!

XLVII Harmonie du Soir

Voici venir les temps où vibrant sur sa tige Chaque fleur s'évapore ainsi qu'un encensoir; Les sons et les parfums tournent dans l'air du soir; Valse mélancolique et langoureux vertige!

Chaque fleur s'évapore ainsi qu'un encensoir; Le violon frémit comme un cœur qu'on afflige; Valse mélancolique et langoureux vertige!

Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir.

Le violon frémit comme un cœur qu'on afflige, Un cœur tendre, qui hait le néant vaste et noir!

Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir; Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige.

Un cœur tendre, qui hait le néant vaste et noir, Du passé lumineux recueille tout vestige!

Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige...

Ton souvenir en moi luit comme un ostensoir!

XLVIII Le Flacon

Il est de forts parfums pour qui toute matière Est poreuse. On dirait qu'ils pénètrent le verre.

En ouvrant un coffret venu de l'Orient Dont la serrure grince et rechigne en criant, Ou dans une maison déserte quelque armoire Pleine de l'âcre odeur des temps, poudreuse et noire, Parfois on trouve un vieux flacon qui se souvient, D'où jaillit toute vive une âme qui revient.

Mille pensers dormaient, chrysalides funèbres, Frémissant doucement dans les lourdes ténèbres, Qui dégagent leur aile et prennent leur essor, Teintés d'azur, glacés de rose, lamés d'or.

Voilà le souvenir enivrant qui voltige

© "https://athena.unige.ch/" Baudelaire, Les Fleurs du Mal, p. 38 / 106

Dans l'air troublé; les yeux se ferment; le Vertige Saisit l'âme vaincue et la pousse à deux mains Vers un gouffre obscurci de miasmes humains; II la terrasse au bord d'un gouffre séculaire, Où, Lazare odorant déchirant son suaire, Se meut dans son réveil le cadavre spectral D'un vieil amour ranci, charmant et sépulcral.

Ainsi, quand je serai perdu dans la mémoire Des hommes, dans le coin d'une sinistre armoire Quand on m'aura jeté, vieux flacon désolé, Décrépit, poudreux, sale, abject, visqueux, fêlé, Je serai ton cercueil, aimable pestilence!

Le témoin de ta force et de ta virulence, Cher poison préparé par les anges! liqueur Qui me ronge, ô la vie et la mort de mon cœur!

XLIX Le Poison

Le vin sait revêtir le plus sordide bouge D'un luxe miraculeux,

Et fait surgir plus d'un portique fabuleux Dans l'or de sa vapeur rouge,

Comme un soleil couchant dans un ciel nébuleux.

L'opium agrandit ce qui n'a pas de bornes, Allonge l'illimité,

Approfondit le temps, creuse la volupté, Et de plaisirs noirs et mornes

Remplit l'âme au delà de sa capacité.

Tout cela ne vaut pas le poison qui découle De tes yeux, de tes yeux verts,

Lacs où mon âme tremble et se voit à l'envers...

Mes songes viennent en foule

Pour se désaltérer à ces gouffres amers.

Tout cela ne vaut pas le terrible prodige De ta salive qui mord,

Qui plonge dans l'oubli mon âme sans remords, Et charriant le vertige,

La roule défaillante aux rives de la mort!

© "https://athena.unige.ch/" Baudelaire, Les Fleurs du Mal, p. 39 / 106

L Ciel Brouillé

Are sens