"Unleash your creativity and unlock your potential with MsgBrains.Com - the innovative platform for nurturing your intellect." » Français Books » 🌚🌚"La Vie est facile, ne t'inquiĂšte pas" de Marie M. Martin-Lugand🌚🌚

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– SĂ©rieusement, je sais que tu ne veux pas t’éloigner des Gens.

– Tu as raison, ça me fait peur, mais tu es lĂ  maintenant, et on ne partira pas longtemps. J’espĂšre que FĂ©lix pourra assurer


Ce soir-lĂ , Olivier dormit chez moi.

Le week-end prolongĂ© du 14 Juillet tombait Ă  point nommĂ©. J’allais devoir me sĂ©parer des Gens quatre jours, et briefer FĂ©lix. Olivier avait tout organisĂ© : destination, billets de train, hĂŽtel.

Cependant, il trouvait que je ne m’octroyais pas assez de congĂ©s. L’avant-veille de notre dĂ©part, il manigança avec FĂ©lix pour que je m’accorde un aprĂšs-midi supplĂ©mentaire, « pour faire le test », se justifiĂšrent-ils. Pour mon plus grand bonheur, ils s’entendaient comme larrons en foire, Olivier riait de toutes les extravagances de FĂ©lix et ne portait pas de regard critique ni jaloux sur notre amitiĂ© complice et fusionnelle. Quant Ă  FĂ©lix, il voyait en Olivier le successeur de Colin, il apprĂ©ciait son humour et surtout le fait qu’il ne pose jamais de questions intrusives sur ma famille perdue.

Durant ce fameux aprĂšs-midi test, Olivier m’accompagna faire les boutiques que je ne frĂ©quentais plus depuis des annĂ©es ; je profitai des soldes pour renouveler ma garde-robe d’étĂ©. Je le suivais sans me prĂ©occuper du chemin empruntĂ©, il me guidait dans les rues de Paris en me tenant la main.

Soudain, il s’arrĂȘta devant un spa. Je l’interrogeai du regard.

– Cadeau !

– Quoi ?

– Durant les deux prochaines heures, quelqu’un va s’occuper de toi. La dĂ©tente des vacances commence aujourd’hui.

– Tu n’aurais pas dû 

– Chut ! Ça me fait plaisir. Ensuite, tu rentres chez toi, tu te prĂ©pares, et je viens te chercher Ă  19 heures.

J’ai repĂ©rĂ© une expo qui devrait te plaire et on dĂźne au resto aprĂšs.

Je lui sautai au cou. Depuis Colin, personne n’avait cherchĂ© Ă  prendre soin de moi comme lui.

J’étais dĂ©tendue, j’avais une peau de bĂ©bĂ©, et j’étrennais une jolie robe noire et des espadrilles compensĂ©es achetĂ©es l’aprĂšs-midi mĂȘme. Avant de descendre aux Gens attendre Olivier, je m’observai dans le miroir ; je fus heureuse de me sentir belle pour lui. Au regard qu’il me lança en me dĂ©couvrant une demi-heure plus tard, je ne fus pas déçue.

Dans le mĂ©tro, je m’accrochais Ă  lui, le regardais, et l’embrassais dans le cou, telle une adolescente

amourachĂ©e. J’avais tournĂ© la page sur tant de choses. Je ne voyais pas ce qui pouvait rompre le charme paisible dans lequel je baignais depuis qu’Olivier Ă©tait entrĂ© dans ma vie. Je commençais Ă  m’avouer que j’étais amoureuse de lui. Un sentiment doux m’envahissait.

Nous sortĂźmes du mĂ©tro Ă  Montparnasse. Je suivais Olivier sans poser de questions. J’étais excitĂ©e comme une puce Ă  l’idĂ©e de faire une expo. Il tint Ă  garder la surprise jusqu’au bout. En arrivant Ă  destination, il me fit tourner le dos Ă  l’entrĂ©e, retardant le moment de me laisser dĂ©couvrir oĂč nous allions. J’entendais de la musique derriĂšre moi ; de la musique celtique dans le quartier breton, quoi de plus normal ?

– J’épluchais le Pariscope quand j’ai repĂ©rĂ© cette expo. Elle ne dure pas longtemps, il fallait en profiter, me dit Olivier, tout content de lui.

– Et c’est sur quoi ?

– Entre et tu verras.

Je poussai la porte. C’était une exposition sur le rapport Ă  la mer des cultures britanniques, Ă©cossaises et irlandaises. L’ambiance crĂ©Ă©e Ă©tait celle d’un pub ; on ne servait pas du champagne et des petits-fours, mais de la Guinness, du whisky et des chips au vinaigre. Mon excitation retomba, laissant place Ă  un malaise abyssal.

– Tu m’as dit que l’Irlande t’avait fait du bien, je me suis dit que ça te plairait.

– Oui, rĂ©ussis-je Ă  articuler.

Olivier me prit par la taille pour commencer Ă  faire le tour de la galerie. Il y avait beaucoup de monde, nous avions du mal Ă  progresser parmi les visiteurs. Je n’osais porter mon regard sur aucune toile, aucune photo, de peur de reconnaĂźtre un paysage, de palper une impression, de faire resurgir des Ă©motions. Je rĂ©pondais par monosyllabes aux questions d’Olivier. Je dĂ©clinai sa proposition de boire une Guinness.

– J’ai eu une mauvaise idĂ©e, j’ai l’impression, finit-il par me dire.

Je lui pris la main, et la serrai fort.

– C’est ma faute, je t’ai dit que j’avais aimĂ© ce pays et vivre prĂšs de la mer, c’est vrai
 mais je n’en ai pas que de bons souvenirs, je n’étais pas au mieux de ma forme lĂ -bas.

– On s’en va, dans ce cas. Te voir souffrir est la derniĂšre chose que je voulais. Je suis dĂ©solĂ©.

– Ne t’en veux pas, mais je prĂ©fĂšre partir, excuse-moi. Reprenons notre soirĂ©e loin de tout ça.

Nous nous dirigeùmes vers la sortie, je restai blottie contre lui, regardant mes pieds. Nous étions presque dehors quand, de la musique et du brouhaha général, émergea une voix. Une voix qui me tétanisa. Une voix qui me renvoya à Mulranny. Une voix qui me donnait le goût des embruns sur les lÚvres. Une voix rauque qui sentait le tabac et que je pensais ne jamais réentendre.

– Attends, dis-je à Olivier en le lñchant.

Je le plantai lĂ , et revins sur mes pas, guidĂ©e et hypnotisĂ©e par l’écho de cette voix, qui rĂ©sonnait comme le chant des sirĂšnes. C’était impossible. J’avais fabulĂ©, perturbĂ©e par le flot de souvenirs qui resurgissait dans cet endroit. Pourtant, je devais en avoir le cƓur net. Je traquai les silhouettes, les visages, j’épiai les conversations, bousculai ceux qui entravaient ma recherche. Et je me figeai.

C’était bien sa voix. Quelques centimĂštres me sĂ©paraient de lui. Il Ă©tait lĂ  : de dos, grand, dĂ©braillĂ©, en chemise, une cigarette entre les doigts qui n’attendait que d’ĂȘtre allumĂ©e. Si je humais l’air, son parfum envahirait mes narines et me renverrait dans ses bras. Je tremblais, ma bouche Ă©tait sĂšche, mes mains moites, j’eus froid, j’eus chaud.

– Edward
, murmurai-je sans le vouloir.

J’eus l’impression que tout le monde m’avait entendue. Lui seul comptait. Son corps se contracta, il baissa le visage quelques secondes, serra les poings, et alluma son briquet nerveusement plusieurs fois de suite. Puis il se retourna. Nos regards s’accrochĂšrent. Le mien lui transmettait ma surprise et mes questions. Le sien, aprĂšs m’avoir dĂ©taillĂ©e de la tĂȘte aux pieds, me renvoya de la froideur, de la distance.

Ses traits Ă©taient toujours aussi durs, arrogants, mangĂ©s par sa barbe. Sa chevelure, aussi dĂ©coiffĂ©e que dans mon souvenir, Ă©tait dĂ©sormais striĂ©e de quelques fils blancs. Il semblait Ă©puisĂ©, marquĂ© par quelque chose que je n’arrivais pas Ă  dĂ©finir.

– Diane, dit-il enfin.

– Que fais-tu là ? lui demandai-je d’une voix tremblante, retrouvant naturellement mon anglais.

– J’expose mes photos.

Are sens

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