"Unleash your creativity and unlock your potential with MsgBrains.Com - the innovative platform for nurturing your intellect." » Français Books » Ainsi parlait Zarathoustra - Friedrich Nietzsche

Add to favorite Ainsi parlait Zarathoustra - Friedrich Nietzsche

Select the language in which you want the text you are reading to be translated, then select the words you don't know with the cursor to get the translation above the selected word!




Go to page:
Text Size:

Mes talons se cambraient, mes orteils écoutaient pour te comprendre : le danseur ne porte-t-il pas son oreille – dans ses orteils !

C’est vers toi que j’ai sauté : alors tu t’es reculée devant mon élan ; et c’est vers moi que sifflaient les languettes de tes cheveux fuyants et volants !

D’un bond je me suis reculé de toi et de tes serpents : tu te dressais déjà à demi détournée, les yeux pleins de désirs.

Avec des regards louches – tu m’enseignes des voies détournées ; sur des voies détournées mon pied apprend – des ruses !

Je te crains quand tu es près de moi, je t’aime quand tu es loin de moi ; ta fuite m’attire, tes recherches m’arrêtent : – je souffre, mais, pour toi, que ne souffrirais-je pas volontiers !

Toi, dont la froideur allume, dont la haine séduit, dont la fuite attache, dont les moqueries – émeuvent :

– qui ne te haïrait pas, grande lieuse, enveloppeuse, séduisante, chercheuse qui trouve !

Qui ne t’aimerait pas, innocente, impatiente, hâtive pécheresse aux veux d’enfant !

Où m’entraînes-tu maintenant, enfant modèle, enfant mutin ? Et te voilà qui me fuis de

nouveau, doux étourdi, jeune ingrat !

Je te suis en dansant, même sur une piste incertaine. Où es-tu ? Donne-moi la main ! Ou

bien un doigt seulement !

Il y a là des cavernes et des fourrés : nous allons nous égarer ! – Halte ! Arrête-toi ! Ne vois-tu pas voltiger des hiboux et des chauves-souris ?

Toi, hibou que tu es ! Chauve-souris ! Tu veux me narguer ? Où sommes-nous ? C’est

des chiens que tu as appris à hurler et à glapir.

Aimablement tu claquais devant moi de tes petites dents blanches, tes yeux méchants pétillent vers moi à travers ta petite crinière bouclée !

Quelle danse par monts et par vaux ! je suis le chasseur : – veux-tu être mon chien ou

mon chamois ?

À côté de moi maintenant ! Et plus vite que cela, méchante sauteuse ! Maintenant en haut ! Et de l’autre côté ! – Malheur à moi ! En sautant je suis tombé moi-même !

Ah ! Regarde comme je suis étendu ! regarde, pétulante, comme j’implore ta grâce !

J’aimerais bien à suivre avec toi – des sentiers plus agréables !

– les sentiers de l’amour, à travers de silencieux buissons multicolores ! Ou bien là-bas,

ceux qui longent le lac : des poissons dorés y nagent et y dansent !

Tu es fatiguée maintenant ? Il y a là-bas des brebis et des couchers de soleil : n’est-il

pas beau de dormir quand les bergers jouent de la flûte ?

Tu es si fatiguée ? Je vais t’y porter, laisse seulement flotter tes bras ! As-tu peut-être soif ? – j’aurais bien quelque chose, mais ta bouche n’en veut pas !

Ô ce maudit serpent, cette sorcière glissante, brusque et agile ! Où t’es-tu fourrée ? Mais sur mon visage je sens deux marques de ta main, deux taches rouges !

Je suis vraiment fatigué d’être toujours ton berger moutonnier ! Sorcière ! j’ai chanté pour toi jusqu’à présent, maintenant pour moi tu dois – crier !

Tu dois danser et crier au rythme de mon fouet ! Je n’ai pourtant pas oublié le fouet ? –

Non ! » –

2.

Voilà ce que me répondit alors la vie, en se bouchant ses délicates oreilles :

« Ô Zarathoustra ! Ne claque donc pas si épouvantablement de ton fouet ! Tu le sais bien : le bruit assassine les pensées, – et voilà que me viennent de si tendres pensées.

Nous sommes tous les deux de vrais propres à rien, de vrais fainéants. C’est par delà le

bien et mal que nous avons trouvé notre île et notre verte prairie – nous les avons trouvées tout seuls à nous deux ! C’est pourquoi il faut que nous nous aimions l’un l’autre !

Et si même nous ne nous aimons pas du fond du cœur, – faut-il donc s’en vouloir, quand

on ne s’aime pas du fond du cœur ?

Et que je t’aime, que je t’aime souvent de trop, tu sais cela : et la raison en est que je

suis jaloux de ta sagesse. Ah ! cette vieille folle sagesse !

Si ta sagesse se sauvait une fois de toi, hélas ! vite mon amour, lui aussi, se sauverait de toi. » –

Are sens

Copyright 2023-2059 MsgBrains.Com