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– J’ai la prétention, répondit le docteur, de faire sauter les ours tous ensemble avec cent livres de poudre.

On regarda le docteur avec surprise.

– Mais la poudre ? lui demanda-t-on.

– Elle est au magasin.

– Et le magasin ?

– Ce boyau y conduit. Ce n’est pas sans motif que j’ai creusé une galerie de dix toises de longueur ; j’aurais pu attaquer le parapet plus près de la maison, mais j’avais mon idée.

– Enfin, cette mine, où prétendez-vous l’établir ? demanda l’Américain.

– À la face même de notre talus, c’est-à-dire au point le plus éloigné de la maison, de la poudrière et des magasins.

– Mais comment y attirer les ours tous à la fois ?

– Je m’en charge, répondit le docteur ; assez parlé, agissons. Nous avons cent pieds de galerie à creuser pendant la nuit ; c’est un travail fatigant ; mais à cinq, nous nous en tirerons en nous relayant. Bell va commencer, et pendant ce temps nous prendrons quelque repos.

– Parbleu ! s’écria Johnson plus j’y pense, plus je trouve le moyen de M. Clawbonny excellent.

– Il est sûr, répondit le docteur.

– Oh ! du moment que vous le dites, ce sont des ours morts, et je me sens déjà leur fourrure sur les épaules.

– À l’ouvrage donc !

Le docteur s’enfonça dans la galerie sombre, et Bell le suivit ; où passait le docteur, ses compagnons étaient assurés de se trouver à l’aise. Les deux mineurs arrivèrent à la poudrière et débouchèrent au milieu des barils rangés en bon ordre. Le docteur donna à Bell les indications nécessaires ; le charpentier attaqua le mur opposé, sur lequel s’épaulait le talus, et son compagnon revint dans la maison.

Bell travailla pendant une heure et creusa un boyau long de dix pieds à peu près, dans lequel on pouvait s’avancer en rampant. Au bout de ce temps, Altamont vint le remplacer, et dans le même temps il fit à peu près le même travail ; la neige, retirée de la galerie, était transportée dans la cuisine, où le docteur la faisait fondre au feu, afin qu’elle tînt moins de place.

À l’Américain succéda le capitaine, puis Johnson. En dix heures, c’est-à-dire vers les huit heures du matin, la galerie était entièrement ouverte.

Aux premières lueurs de l’aurore, le docteur vint considérer les ours par une meurtrière qu’il pratiqua dans le mur du magasin à poudre.

Ces patients animaux n’avaient pas quitté la place. Ils étaient là, allant, venant, grognant, mais, en somme, faisant leur faction avec une persévérance exemplaire ; ils rôdaient autour de la maison, qui disparaissait sous les blocs amoncelés. Mais un moment vint pourtant où ils semblèrent avoir épuisé leur patience, car le docteur les vit tout à coup repousser les glaçons qu’ils avaient entassés.

– Bon ! dit-il au capitaine, qui se trouvait près de lui.

– Que font-ils ? demanda celui-ci.

– Ils m’ont tout l’air de vouloir démolir leur ouvrage et d’arriver jusqu’à nous ! Mais un instant ! ils seront démolis auparavant. En tout cas, pas de temps à perdre.

Le docteur se glissa jusqu’au point où la mine devait être pratiquée ; là, il fit élargir la chambre de toute la largeur et de toute la hauteur du talus ; il ne resta bientôt plus à la partie supérieure qu’une écorce de glace épaisse d’un pied au plus ; il fallut même la soutenir pour qu’elle ne s’effondrât pas.

Un pieu solidement appuyé sur le sol de granit fit l’office de poteau ; le cadavre du renard fut attaché à son sommet, et une longue corde, nouée à sa partie inférieure, se déroula à travers la galerie jusqu’à la poudrière.

Les compagnons du docteur suivaient ses instructions sans trop les comprendre.

– Voici l’appât, dit-il, en leur montrant le renard.

Au pied du poteau, il fit rouler un tonnelet pouvant contenir cent livres de poudre.

– Et voici la mine, ajouta-t-il.

– Mais, demanda Hatteras, ne nous ferons-nous pas sauter en même temps que les ours ?

– Non ! nous sommes suffisamment éloignés du théâtre de l’explosion ; d’ailleurs, notre maison est solide ; si elle se disjoint un peu, nous en serons quittes pour la refaire.

– Bien, répondit Altamont ; mais maintenant comment prétendez-vous opérer ?

– Voici, en halant cette corde, nous abattrons le pieu qui soutient la croûte de la glace au-dessus de la mine ; le cadavre du renard apparaîtra subitement hors du talus, et vous admettrez sans peine que des animaux affamés par un long jeûne n’hésiteront pas à se précipiter sur cette proie inattendue.

– D’accord.

– Eh bien, à ce moment, je mets le feu à la mine, et je fais sauter d’un seul coup les convives et le repas.

– Bien ! bien ! s’écria Johnson, qui suivait l’entretien avec un vif intérêt.

Hatteras, ayant confiance absolue dans son ami, ne demandait aucune explication. Il attendait. Mais Altamont voulait savoir jusqu’au bout.

– Docteur, dit-il, comment calculerez-vous la durée de votre mèche avec une précision telle que l’explosion se fasse au moment opportun ?

– C’est bien simple, répondit le docteur, je ne calculerai rien.

– Vous avez donc une mèche de cent pieds de longueur ?

– Non.

– Vous ferez donc simplement une traînée de poudre ?

– Point ! cela pourrait rater.

– Il faudra donc que quelqu’un se dévoue et aille mettre le feu à la mine ?

– S’il faut un homme de bonne volonté, dit Johnson avec empressement, je m’offre volontiers.

– Inutile, mon digne ami, répondit le docteur, en tendant la main au vieux maître d’équipage, nos cinq existences sont précieuses, et elles seront épargnées, Dieu merci.

– Alors, fit l’Américain, je renonce à deviner.

– Voyons, répondit le docteur en souriant, si l’on ne se tirait pas d’affaire dans cette circonstance, à quoi servirait d’avoir appris la physique ?

– Ah ! fit Johnson rayonnant, la physique !

– Oui ! n’avons-nous pas ici une pile électrique et des fils d’une longueur suffisante, ceux-là mêmes qui servaient à notre phare ?

– Eh bien ?

Are sens