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Add to favorite "La vérité sur l'affaire Harry Quebert" de Joël Dicker

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- Je sais que ça paraît fou, révérend. Mais c’est pourtant la vérité.

- Enfin, ça n’a pas de sens. Pourquoi Nola te raconterait-el e ce genre de sornettes ? Ne sais-tu pas que sa mère est morte ? Tu veux nous faire de la peine à tous, c’est ça ?

- Non, mais…

David Kellergan voulut clore la conversation, mais Stefanie insista. Le visage du révérend changea soudain, elle ne l’avait jamais vu ainsi : pour la première fois, le chaleureux pasteur avait un visage sombre et presque effrayant.

- Je ne veux plus t’entendre parler de cette histoire ! lui intima-t-il. Ni à moi, ni à personne, tu m’entends ? Sinon j’irai dire à tes parents que tu es une petite menteuse.

Et je dirai que je t’ai surprise en train de voler au temple. Je dirai que tu m’as volé cinquante dol ars. Tu ne veux pas avoir de sérieux ennuis, non ? Alors sois une gentille fille.

Stefanie interrompit son récit. Elle joua un instant avec les photos avant de se tourner vers moi.

- Alors je n’en ai plus jamais parlé, dit-elle. Mais je n’ai jamais oublié cet épisode.

Au fil des années, j’en suis venue à me persuader que j’avais dû mal entendre, mal comprendre, et qu’il ne s’était rien passé de tel. Et voilà que sort votre livre et que j’y retrouve cette mère abusive et bien vivante. Je ne peux pas vous dire ce que ça m’a fait; vous avez un talent fou, Monsieur Goldman. Il y a quelques jours, lorsque les journaux ont commencé à dire que vous racontiez n’importe quoi, je me suis dit qu’il fallait que je vous contacte. Parce que je sais que vous dites la vérité.

- Mais quelle vérité ? m’écriai-je. La mère est morte depuis toujours.

- Je le sais bien. Mais je sais aussi que vous avez raison.

- Est-ce que vous pensez que Nola était battue par son père ?

- C’est ce qui se disait en tout cas. À l’école, on remarquait toutes les traces sur son corps. Mais qui allait s’élever contre notre révérend ? À Aurora, en 1975, on ne se mêlait pas des affaires des autres. Et puis c’était une autre époque. Tout le monde recevait une claque de temps en temps.

- Auriez-vous d’autres éléments qui vous viennent à l’esprit ? demandai-je encore. Par rapport à Nola, ou au livre ?

Elle prit un instant de réflexion.

- Non, répondit-el e. Si ce n’est que c’est presque… amusant de découvrir après toutes ces années que c’était de Harry Quebert que Nola était amoureuse.

- Que voulez-vous dire ?

- Vous savez, j’étais une enfant si naïve. Après l’épisode du square, j’ai moins fréquenté Nola. Mais l’été de sa disparition, je l’ai recroisée régulièrement. Durant cet été 1975, j’ai pas mal travaillé dans le magasin de mes parents, situé face au bureau de poste de l’époque. Et figurez-vous que je n’ai pas arrêté de croiser Nola. Elle allait poster des lettres. Je l’ai su, parce qu’à force de la voir passer devant le magasin, je l’ai questionnée. Un jour, elle a fini par lâcher le morceau. Elle m’a dit qu’elle était fol e amoureuse de quelqu’un et qu’ils correspondaient. Elle n’a jamais voulu me dire de qui il s’agissait. Je pensais que c’était Cody, un type de seconde, membre de l’équipe de basket. Je n’ai jamais réussi à voir le nom du destinataire, mais une fois j’ai aperçu que c’était à Aurora. Je m’étais demandé quel était l’intérêt d’écrire à quelqu’un habitant Aurora depuis Aurora.

Lorsque nous sortîmes de chez Stefanie Larjinjiak, Gahalowood me regarda avec de grands yeux circonspects. Il dit :

- Mais qu’est-ce qui est en train de se passer, l’écrivain ?

- J’allais vous poser la question, sergent. Selon vous, que devons-nous faire à présent ?

- Ce que nous aurions dû faire il y a longtemps : aller à Jackson, Alabama. Vous aviez posé la bonne question depuis toujours, l’écrivain : que s’est-il passé en Alabama ?

4. Sweet home Alabama

“Lorsque vous arrivez en fin de livre, Marcus, offrez à votre lecteur un rebondissement de dernière minute.

- Pourquoi ?

- Pourquoi ? Mais parce qu’il faut garder le lecteur en haleine jusqu’au bout.

C’est comme quand vous jouez aux cartes : vous devez garder quelques atouts pour la fin.”

Jackson, Alabama, 28 octobre 2008

Et nous débarquâmes en Alabama.

À notre arrivée à l’aéroport de Jackson, nous fûmes accueil is par un jeune officier de la police d’État, Philip Thomas, que Gahalowood avait contacté quelques jours plus tôt. Il se tenait dans le secteur des arrivées, en uniforme, droit comme un i, chapeau sur les yeux. Il salua Gahalowood avec déférence, puis, me regardant, il releva légèrement son chapeau.

- Est-ce que je ne vous aurais pas déjà vu quelque part ? me demanda-t-il. À la télévision ?

- Peut-être, répondis-je.

- Je vais vous aider, intervint Gahalowood. C’est de son livre que tout le monde parle. Méfiez-vous de lui, il est capable de générer un bordel dont vous n’avez pas idée.

- Alors la famil e Kellergan est cel e que vous décrivez dans votre livre ? me demanda l’officier Thomas en essayant de masquer son étonnement.

- Exact, répondit encore Gahalowood à ma place. Restez loin de ce type, officier.

Moi-même, je menais une existence paisible jusqu’à ce que je le rencontre.

L’officier Thomas avait pris son rôle très au sérieux. À la demande de Gahalowood, il nous avait préparé un petit dossier sur les Kel ergan, que nous parcourûmes dans un restaurant proche de l’aéroport.

- David J. Kellergan est né à Montgomery en 1923, nous expliqua Thomas. Il y a fait ses études de théologie avant de devenir pasteur et de venir à Jackson pour officier au sein de la paroisse Mt Pleasant. Il s’est marié avec Louisa Bonneville en 1955. Ils habitaient une maison d’un quartier tranquille du nord de la ville. En 1960, Louisa Kel ergan a donné naissance à une fille, Nola. Il n’y a rien de plus à signaler. Une famil e tranquille et croyante de l’Alabama. Jusqu’à ce drame, en 1969.

- Un drame ? répéta Gahalowood.

- Il y a eu un incendie. Une nuit, la maison a brûlé. Louisa Kellergan est morte dans l’incendie.

Thomas avait joint au dossier des copies d’articles de journaux de l’époque.

Incendie mortel à Lower Street

Une femme est morte hier soir dans l’incendie de sa maison, sur Lower Street.

D’après les pompiers, une bougie restée allumée pourrait être à l’origine du drame. La maison a été entièrement détruite. La victime est la femme d’un pasteur de la région.

Un extrait du rapport de police indiquait que la nuit du 30 août 1969, vers une heure du matin, alors que le révérend David Kellergan s’était rendu au chevet d’un paroissien mourant, Louisa et Nola furent surprises par un incendie durant leur

sommeil. C’est en arrivant devant sa maison que le révérend remarqua un intense dégagement de fumée. Il se précipita à l’intérieur : l’étage était déjà en feu. Il parvint cependant à gagner la chambre de sa fil e; il la trouva dans son lit, à moitié inconsciente. Il la porta jusque dans le jardin puis voulut retourner chercher sa femme, mais l’incendie s’était désormais propagé aux escaliers. Des voisins, alertés par les cris, accoururent mais ils ne purent que constater leur impuissance. Lorsque les pompiers arrivèrent, l’étage entier s’était embrasé : des flammes jaillissaient par les fenêtres et dévoraient le toit. Louisa Kellergan fut retrouvée morte, asphyxiée. Le rapport de police conclut qu’une bougie restée allumée avait vraisemblablement mis le feu aux rideaux avant que l’incendie se propage rapidement au reste de la maison, bâtie en planches. Le révérend Kellergan précisa d’ailleurs dans sa déclaration que sa femme allumait souvent une bougie parfumée sur sa commode avant de s’endormir.

- La date ! m’écriai-je en lisant le rapport. Regardez la date de l’incendie, sergent !

- Nom de Dieu : le 30 août 1969 !

- L’officier qui a mené l’enquête a longtemps eu des doutes sur le père, expliqua Thomas.

- Comment le savez-vous ?

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