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La seule idée de ne plus savoir où était passé le morceau de papier qui pouvait faire perdre Harry mettait Tamara dans tous ses états. Pour se calmer, el e s’empara de la pelle à tarte et coupa plusieurs tranches d’un geste guerrier, tandis que Bobbo sanglotait parce qu’il n’avait pas du tout envie de mourir.

Mercredi 17 septembre 1975

La recherche du feuil et obsédait Tamara Quinn. Elle avait passé deux jours à fouiller sa maison, sa voiture, et même le garage où elle n’allait jamais. En vain. Ce matin-là, après le lancement du premier service du petit déjeuner au Clark’s, elle s’enferma dans son bureau et vida le contenu de son coffre sur le sol : personne n’avait accès au coffre, c’était impossible que le feuillet ait disparu. Il devait être là. Elle en revérifia le contenu, en vain; dépitée el e remit ses affaires en ordre. À cet instant, Jenny frappa et passa la tête par l’entrebâillement de la porte. Elle trouva sa mère plongée dans l’énorme gueule d’acier.

- Ma’ ? Qu’est-ce que tu fais ?

- Je suis occupée.

- Oh, Ma’ ! Ne me dis pas que tu es encore en train de chercher ce satané morceau de papier ?

- Occupe-toi de tes salades, ma fil e, veux-tu ? Quelle heure est-il ?

Jenny consulta sa montre.

- Presque huit heures trente, dit-elle.

- Archi zut ! Je suis en retard.

- En retard où ?

- J’ai un rendez-vous.

- Un rendez-vous ? Mais nous devons réceptionner les boissons ce matin. Déjà mercredi dernier tu…

- Tu es une grande fil e, non ? l’interrompit sèchement sa mère. Tu as deux bras, tu sais où est la réserve. Pas besoin d’être allée à Harvard pour empiler des caisses de bouteilles de Coca les unes sur les autres : je suis sûre que tu t’en tireras très bien. Et ne va pas faire les yeux doux au livreur pour qu’il le fasse pour toi ! Il est temps de

retrousser tes manches !

Sans adresser un regard à sa fille, Tamara attrapa ses clés de voiture et s’en al a. Une demi-heure après son départ, un imposant camion se gara derrière le Clark’s : le livreur déposa une lourde palette chargée de caisses de Coca devant l’entrée de service.

- Z’avez besoin d’aide ? demanda-t-il à Jenny après qu’el e eut signé le reçu.

- Non, M’sieur. Ma mère veut que je me débrouil e toute seule.

- Comme vous voudrez. Bonne journée alors.

Le camion repartit et Jenny entreprit de soulever une à une les lourdes caisses pour les porter dans la réserve. Elle avait envie de pleurer. À cet instant, Travis, qui passait par là à bord de son véhicule de patrouille, l’aperçut. Il se gara aussitôt et descendit de voiture.

- Besoin d’un coup de main ? proposa-t-il.

Elle haussa les épaules.

- Ça va. Tu dois certainement avoir à faire, répondit-elle sans interrompre son effort.

Il empoigna une caisse et essaya de faire la conversation.

- Ils disent que la recette du Coca est secrète et qu’elle est conservée dans un coffre à Atlanta.

- Je savais pas.

Il suivit Jenny jusqu’à la réserve et ils empilèrent l’une sur l’autre les deux caisses qu’ils venaient de porter. Comme el e ne parlait pas, il reprit son explication :

- Il paraît aussi que ça donne bon moral aux GI’s, et que depuis la Deuxième Guerre mondiale ils en envoient des caisses aux troupes stationnées à l’étranger. Je l’ai lu ça dans un livre sur le Coca. Enfin, je l’ai lu comme ça, je lis aussi des livres plus sérieux.

Ils ressortirent sur le parking. Elle le regarda dans le fond des yeux.

- Travis…

- Oui, Jenny ?

- Serre-moi fort. Prends-moi dans tes bras et serre-moi fort ! Je me sens si seule ! Je me sens si malheureuse ! J’ai l’impression d’avoir froid jusqu’au fond de mon cœur.

Il la prit dans ses bras et l’étreignit du plus fort qu’il put.

- Voilà que ma fille me pose des questions, docteur. Tout à l’heure, elle m’a demandé où je me rendais tous les mercredis.

- Que lui avez-vous répondu ?

- Qu’elle aille se faire voir ! Et qu’el e réceptionne les palettes de Coca ! Ça ne la regarde pas, où je vais !

- Je sens à votre voix que vous êtes en colère.

- Oui ! Oui ! Bien sûr que je suis en colère, docteur Ashcroft !

- En colère contre qui ?

- Mais contre… contre… contre moi !

- Pourquoi ?

- Parce que je lui ai encore crié dessus. Vous savez, docteur, on fait des enfants et on veut qu’ils soient les plus heureux du monde. Et puis la vie vient se mettre en

travers de nous !

- Que voulez-vous dire ?

- Elle est toujours à me demander conseil pour tout ! Elle est toujours dans mes jupons, à me demander : Ma’, comment on fait ça ? Ma’, où est-ce qu’on range ça ? Ma’

par-ci et Ma’ par-là ! Ma’ ! Ma’ ! Ma’ ! Mais je ne serai pas toujours là pour elle ! Un jour je ne pourrai plus veiller sur el e, vous comprenez ! Et quand j’y pense, ça me prend là, dans le ventre ! Comme si tout mon estomac se nouait ! C’est physiquement douloureux et ça me coupe l’appétit !

- Vous voulez dire que vous avez des angoisses, Madame Quinn ?

- Oui ! Oui ! Des angoisses ! Des angoisses terribles ! On essaie de faire tout bien, on essaie de donner ce qu’il y a de meil eur à nos enfants ! Mais que feront nos enfants lorsque nous ne serons plus là ? Que feront-ils, hein ? Et comment être sûrs qu’ils seront heureux et qu’il ne leur arrivera jamais rien ? C’est comme cette gamine, docteur Ashcroft ! Cette pauvre Nola, que lui est-il arrivé ? Et où peut-elle bien être ?

Où pouvait-elle bien être ? Elle n’était pas à Rockland. Ni sur les plages, ni dans les restaurants, ni dans la boutique. Nulle part. Il téléphona à l’hôtel de Martha’s Vineyard pour savoir si le personnel n’avait pas vu une jeune fil e blonde, mais le réceptionniste à qui il parla le prit pour un fou. Alors il attendit, tous les jours et toutes les nuits.

Il attendit tout le lundi.

Are sens